Adresse aux abbés de la Fraternité saint Pierre pour un peu de réalisme en ce qui concerne le mariage. Une réponse d’époux catholiques au dossier Théologie du corps de « Tu es Petrus ». Gabrielle et B. Vialla
« Ne le savez-vous pas ? Votre corps est un sanctuaire de l’Esprit Saint, lui qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu ; vous ne vous appartenez plus à vous-mêmes, car vous avez été achetés à grand prix. Rendez donc gloire à Dieu dans votre corps. » 1Co 6, 19-20.
Nous laisserons le soin aux théologiens de lister les erreurs historiques, logiques, théologiques du dossier et appelons de nos vœux des réactions nombreuses. Pour nous-mêmes simples fidèles il semble évident qu’il faille distinguer l’œuvre d’un pape canonisé des interprétations non encore autorisées par le Magistère.
Cela étant, comme laïcs promoteurs de la régulation naturelle des naissances en tant qu’apostolat en faveur de la famille, nous avons des éléments pratiques à apporter.
Des théologiens thomistes seront attachés à la démarche métaphysique et donc à recevoir la réalité telle qu’elle est. Car « le diable porte pierre », et les développements les plus récents de la culture de mort mettent paradoxalement en lumière des éléments de vérité contenus dans l’œuvre du Créateur dont nous n’avons pas encore tiré toutes les conclusions. Nous en proposons deux ici de façon concise, et vous renvoyons à nos ouvrages Confidences Billings à un frère prêtre et Recevoir le féminin.
- La réalité du cycle féminin.
Il est de bon ton de porter la réflexion morale conjugale, en ce qui concerne la régulation naturelle des naissances, sur l’usage des périodes dites infertiles.
Or les progrès techniques de la pharmacologie la plus récente en matière de contraception hormonale consistent justement à agir sur cette période post-ovulatoire, dite infertile, afin de rendre l’ensemble du cycle infertile. Ce qui amène à se pencher plus finement sur la physiologie fine du cycle féminin. Et oh merveille, on constate que toutes les phases du cycle sont en faveur de la vie, contribuant à la possibilité de la procréation.
Les termes prophétiques de l’Église telle que le Bx Paul VI nous les donne dans Humanae Vitae, sur la nécessaire « ouverture à la vie » pour toutes les unions des époux, n’ont donc rien d’une hypocrisie. De nombreuses erreurs de raisonnement viennent d’un vocabulaire inadéquat. S’il avait eu la connaissance du cycle, saint Thomas lui-même n’aurait sans doute pas raisonné à partir de termes qui ne représentent pas adéquatement la réalité. Il faudrait parler de « temps où une union ne peut aboutir à une conception » et non de période infertile. Ce réalisme pratique amène à poser différemment les problématiques.
La fin procréative de l’union conjugale est résolue lorsque d’une part l’acte conjugal et d’autre part le cycle féminin sont pleinement respectés. On peut s’interroger sur les raisons de privilégier telle ou telle période du cycle, sur la générosité à laquelle sont appelés les époux… mais un certain nombre de faux problèmes, comme l’analogie alléguée entre contraception et utilisation des périodes agénésiques, tombent d’eux-mêmes. Comme celui qui consisterait à distinguer des fins de l’acte conjugal non pour les unir, mais pour les opposer finalement à force de les hiérarchiser. Ce faisant on travaille d’ailleurs analogiquement à ce que fait déjà la mentalité contraceptive, on dissocie ce qu’il convient d’unir de façon « indissoluble » (Humanae Vitae n°12). Pour aller plus loin sur cela, nous vous renvoyons aux partie II et III de Recevoir le féminin.
- La réalité de l’acte conjugal lui-même.
L’expérience du terrain nous a instruit de ceci :
– Un acte conjugal chaste (la chasteté est aussi pour l’acte conjugal et concerne la pureté des époux) est foncièrement un acte qui ne s’oppose pas à la dimension procréative.
– A contrario, un acte conjugal procréatif, à l’ère de la pornographie n’est pas toujours un acte qui honore la pureté des époux. De plus en plus de femmes se plaignent de tel geste, telle demande de leur mari qu’elles subissent et qui viennent directement de la pornographie, mais qui est « justifié » a posteriori parce que l’union a fini par être complète et sans moyen de contraceptif.
D’autre part, nous avons à plusieurs reprises reçu des couples « de la Tradition » qui étaient instruits de l’illicéité de la contraception comme de la fivete, mais qui ne voyaient pas la difficulté de l’insémination artificielle.
Le mauvais débat des fins du mariage, absolutisé sans tenir suffisamment compte du Magistère récent, qui répond aux attaques de la culture de mort actuelle, participe à la grande confusion chez les fidèles en ce qui concerne la réalité de l’acte conjugal lui-même, et de sa dignité.
Nous ajoutons ici que systématiquement maintenant Gabrielle demande aux dames qui vivent des difficultés avec leur corps (observation, frigidité, etc.) si elles n’ont pas été « bousculées » par leurs maris. Et malheureusement c’est loin d’être rare. Nous nous interrogeons et portons à votre attention le manque de conscience de la dignité propre de l’acte conjugal comme de la personne de l’épouse. Car soyons clairs : si l’on met en compétition les fins du mariage, de façon rigoriste, c’est la femme qui trinque. Pas l’homme ! L’homme ne porte pas les enfants. Sa sexualité est plus rapide et nécessite moins de temps, moins d’attention.
Si la dimension procréative est terriblement abimée, aujourd’hui, par la contraception et l’avortement, la dimension unitive n’en est pas épargnée. Elle aussi est méprisée. Il s’agit pour les époux de trouver auprès de leurs pasteurs un soutien moral, spirituel qui tient compte de la réalité présente.
Pour aller plus loin : Confidences Billings à un frère prêtre (2e édition de 2015) chapitres 3 et 4, et les annexes.
L’expérience commune nous enseigne que les enfants vont bien quand les parents vont bien. Quand les familles vont bien, les paroisses vont bien. Les paroisses vont bien, quand les abbés sont conscients de ce que vivent les familles.
Merci aux prêtres qui sont conscients du combat spirituel des époux. Ils sont nombreux, nous le savons. Ils doivent être secrètement dépités de ce pétrus tourné en vinaigre. Vous pardonnerez ce mauvais jeu de mots, mais nous attendons confiants une prochaine cuvée exceptionnelle qui rende grâce pour l’aspect prophétique d’Humanae Vitae de Paul VI, dont nous célébrons les 50 ans, en juillet. Un pétrus qui reconnaîtra, pour le bien des familles, et pour un véritable respect de la vie, la sainteté de Jean-Paul II, sans saucissonnage de son enseignement ; un enseignement à lire dans le texte.
Qu’ils soient bien plus nombreux ceux (laïcs et prêtres) qui choisissent l’apostolat en faveur de la vie et de la famille, et acceptent de répondre à la misère qui découle des structures de péché.